La présence de pesticides dans la chaîne alimentaire n'est pas une nouveauté. Le bilan de la teneur en pesticides des végétaux entrant dans l'alimentation humaine, que l'Union européenne demande à ses membres de publier chaque année, en atteste régulièrement. Néanmoins, si la contamination des aliments et de l'eau est relativement bien connue, il n'en va pas de même de celle du vin.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Les 3,5% de la superficie agricole, consacrés à la production de raisin, reçoivent environ 15% des pesticides de synthèse appliqués sur les grandes cultures. Si une grande partie des épandages se rapportent à des applications de soufre, relativement peu dangereuses au regard des produits utilisés contre l'oïdium (1), une évaluation publiée par le ministère français de l'agriculture, en 2005, montre que près d'un tiers des pesticides appliqués aux raisins sont systématiquement transférés au vin lors de sa production. Face à ce constat, il n'est pas inintéressant de se pencher sur le taux et le type de pesticides présents dans le vin.
C'est ce qu'ont fait les associations du Pesticides Action Network Europe (2) en analysant 40 bouteilles de vin rouge en provenance de France, d’Autriche, d’Allemagne, d’Italie, du Portugal, d’Afrique du sud, d’Australie et du Chili (3).
Les résultats sont sans ambiguïté : la totalité des vins issus des vignes cultivées de manière conventionnelle sont contaminés, avec en moyenne des résidus de 4 pesticides différents (les plus contaminés d’entre eux affichant jusqu'à 10 pesticides). Mis à part un cas spécifique, les vins biologiques analysés ne présentent pas de traces de pesticides. Le seul vin bio contaminé est produit à proximité de parcelles menées de façon conventionnelle.
Sachant qu'à l'inverse de l'eau, il n’existe pas de limites maximales autorisées (LMR) à la contamination du vin, on se réfère à celles utilisées pour le raisin, lesquelles sont très importantes (les plus élevées de la production de fruits). Face à ce vide légal, rien d'étonnant que les niveaux de contamination observés dans le vin battent tous les records et laissent loin derrière les niveaux tolérés pour les pesticides dans l’eau. L'étude a ainsi enregistré un maximum s'élevant à 5800 fois les Concentrations Maximales Admissibles (CMA) autorisées par pesticide dans l’eau du robinet !
Parmi les substances identifiées, de nombreuses sont considérées comme des cancérigènes possibles ou probables, des toxiques du développement ou de la reproduction, des perturbateurs endocriniens ou encore des neurotoxiques (4). Ainsi, à titre d'exemple, de la procymidone classée cancérigène, reprotoxique et perturbateur endocrinien par l’UE a été trouvé dans plusieurs vins français et italiens.
Alex Belvoit
1- Présent sur l’ensemble de la planète, ce champignon microscopique attaque les feuilles et les raisins. C’est le principal ravageur de la vigne.
2- L’étude a été coordonnée par PAN-Europe et soutenue par le MDRGF pour la France, Global 2000 pour l’Autriche et Greenpeace pour l’Allemagne.
3- Sélectionnés parmi des marques à bas prix et haut de gamme, 34 vins étaient issus de l’agriculture intensive et 6 d’une production biologique.
4- D’après les classifications de l’Union européenne et de l’organisation mondiale de la santé.